Evaluer autrement ?, par Rémy David

Évaluer autrement

Contribution de Rémy David, EPhA du 5 juin 2015

Quelles sont les pratiques d'évaluation que nous pratiquons en classe de terminale, et en amont, qui nous semblent constituer une alternative aux épreuves académiques du Baccalauréat de philosophie ?

Constat dramatique de l'année de terminale et de sa certification.
Peut-on évaluer autre chose que l'échec de notre enseignement à l'examen terminal certificatif ?

Peut-on faire jouer à l'évaluation d'autres fonctions que celle de valider notre incompétence et notre absence de professionnalisme collectif ?
Du côté des enseignants : Pourquoi l'échec de nos élèves à l'examen dans notre discipline ne nous invite-t-il pas, ne nous oblige-t-il pas, à changer de pratiques ? En quoi l'évaluation de nos élèves nous renseigne-t-elle sur ce que nous avons construit avec eux, ou de ce qu'ils ont construit avec nous ? L'évaluation n'est-elle pas davantage l'évaluation de ce que nous avons su et pu construire dans notre enseignement ? L'évaluation participe également de la question de savoir si nous savons faire réussir en philosophie d'autres élèves que la « tête de classe », que ceux qui finalement n'auraient pas eu besoin de nous. Savons-nous faire réussir les élèves moyens, ou ne nous adressons-nous qu'à une élite scolaire, sans être capable de déjouer le diagnostic scolaire prévisible ?
Du côté des élèves : Comment faire pour que l'évaluation participe à l'apprentissage des élèves, pour qu'elle ne soit pas seulement la sanction d'un savoir acquis ou construit, la mise en œuvre d'une ou plusieurs compétences, mais l'occasion d'apprendre et de se former ? Quelle culture de l'évaluation notre discipline devrait-elle développer dans une culture scolaire très sclérosante à cet égard ? Comment déconstruire l'approche économique du travail scolaire : le paradigme salarial (tout travail mérite salaire), le paradigme économique : quel est la rentabilité de cet investissement scolaire : la philosophie est l'un des investissements qui scolairement est le moins rentable
Du point de vue de l'institution, peut-on éviter le piège d'une validation ne correspondant à aucune réalité, et qui ne serait que formelle (quel est le sens des « évaluations du premier trimestre de terminale ?) ? Le cycle trimestriels ne biaise-t-il pas l'enseignement et son évaluation, dans une « année » (de 9 mois) qui doit conjuguer la contradiction de la découverte et de la performance ?

Pour me centrer plus strictement sur l'évaluation :


Quelles pistes ai-je expérimentées ou frayées ?


Au total, les évaluations de type Bac constituent la moitié des exercices et évaluations proposées aux élèves. Cela me permet d'en relativiser la portée, de montrer aux élèves qu'ils peuvent être en réussite, qu'ils sont capables de philosopher.

J'essaie de développer une évaluation par contrat de confiance. Ce concept consiste à évaluer les élèves exactement sur des exercices sur lesquels ils se sont entraînés, supprimant ce qui constitue souvent un principe inhibant de l'évaluation, la surprise du transfert d'exercice, qui met l'élève en difficulté en supposant une plus grande modélisation, en déplaçant le problème vers la prise de risque vis-à-vis de l'inédit. J'ai longtemps pratiqué le transfert, car c'est le principe de la dissertation sur un sujet inédit donc improbable, au baccalauréat. Mais je m'oriente vers des exercices plus préparés, balisés, qui leur permettent de se rassurer : mobiliser ce que le cours a permis de penser d'un film ; effectuer une fiche de révision ; achever la dissertation sur laquelle nous avons passé 3 ou 4 heures en cours.
Les fiches de lecture vont davantage être l'occasion d'une rencontre et d'une assomption du risque de penser, en se confrontant à la pensée d'autrui (l'auteur), à sa langue et ses perspectives. Les enjeux sont d'entrer suffisamment dans la complexité pour dépasser la paraphrase d'une part, et engager une réflexivité de l'autre.

En seconde : le travail porte sur le film, dans un Enseignement de découverte. Les écrits évaluatif sont l'occasion pour les élèves de pratiquer un réflexion individuelle, u parfois collective, sur des nouveaux objets pour eux :



Remarques et discussions sur la présentation de Rémy David, à propos des pistes frayées pour « évaluer autrement » :
- Tu cherches à évaluer l'entrée réelle de l'élève dans quelque chose, une culture : tu promeus plus un contrôle continu, cad la puissance et la dynamique de travail qu'il a mis en œuvre, ce qui n'aboutit pas à un standard. On a eu un débat sur l'erreur au LNC, or je soutiens qu'il n'y a pas d'erreur. C'est proche de la question du sens de philosopher. Comment tu évalues ? C'est très psychologique...
Peut-on s'autoriser à contraindre un élève dans un problème ? Dans la question de la laïcité : faut-il respecter une croyance, ou faut-il respecter ses croyances ? Peut-on contraindre quelqu'un à philosopher ? Le risque de penser peut-il être évalué ? Cela peut être très violent. Comment mesure-t-on un investissement singulier, un sens de la philosopher ?

- Comment fait-on pour évaluer ? Dans la présentation effectuée, il y a des objets d'évaluation « autres », mais RD ne dit rien de comment il évalue, de l'acte même d'évaluation ; il explique ce qu'il construit pour évaluer, mais c'est là que l'évaluation commence. Selon quels critères ? comment éviter l'arbitraire ? La présentation de ces exercices n'explique en quoi il s'agit d'évaluer « autrement » ; n'est-ce pas plutôt évaluer autre chose de la même manière ?
S'agit-il d'évaluer du philosopher autrement ou d'évaluer autrement du philosopher ?

Pourquoi ne pas témoigner d'un parcours réflexif ?
Qui est bien placé pour savoir si un élève a bougé ? Ne s'agit-il pas d'un encouragement, une forme d'invitation à poursuivre le travail ?
Est-ce que cela ne recouvre pas une ambiguïté ou une ambivalence, une controverse de notre professionnalité : sait-on ce qu'on fait et ce qu'on doit faire ?

Mettre des choses en débat n'est-ce pas mettre en route les choses vers la problématisation ? Il y a du désaccord comment se questionne-t-on vis-à-vis de cela ?


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